Ardèche

L’auteur y raconte l’enfant qu’il était, sa vie au village, à l’école, avec en toile de fond la question de la langue. « On parlait patois dans les familles, dans la rue. On récitait en français à l’école. On chantait en latin à l’église. Mais on ne profitait pas de ce trilinguisme car, une hiérarchie qu’on croyait venue du fond des temps, faisait du latin la langue de Dieu, inaccessible, et du français, la Langue, la seule, la vraie, la raison d’être de l’école. L’Occitan, langue maternelle de l’écolier, était méprisé, condamné par l’instituteur…Nul ne conteste l’apport considérable de l’école, mais fallait-il qu’elle méprisât et détruisit autant ? Qu’elle tentât d’asphyxier les diverses langues de France au profit d’une seule ? »

BOUGRES D’ÂNES ! Troisième édition, ne théorise pas, n’argumente pas. Il dépeint, avec humour, ce face à face quotidien village-école, en un lieu bien réel, dans les années 30. Ce livre m’a ému, et m’a sensibilisé au patois de ma vallée, de ce trésor menacé, de ce patrimoine…

«  Mai me fau vielh, mai m’avise d’aver forçat dins una rega que m’alunchava de ieu ; oç, ai forçat tot l osant clame d’annadas d’escola longassas per me sortir d’un monde qu’éra mieu e qu’auria pogut lo demorar. Mas l’escola éra aqui per me far vergonha d’aquel monde mieu. Parlava pad, ela, la lenga de mei gents, la lenga dau vilatge, e me podiai pas pensar que l’escola se poguèsse enganar o que foguèsse una aisina, un mejan au servici d’una politica amassaira, unificaira e estraçaira d’aquo nostre. » p.24/25

« Plus je vieillis, plus je m’avise d’avoir peiné dans une voie qui m’éloignait de moi ; oui, j’ai vécu de longues années d’étude pour sortir d’un monde qui était le mien et qui aurait pu le demeurer. Mais l’école était là pour me faire honte de ce monde à moi. Elle ne parlait pas, elle, la langue des parents, la langue du village, et je ne pouvais penser qu’elle se puisse tromper ou qu’elle fût un instrument, un moyen, au service d’une politique accapareuse, uniformisatrice et réductrice de notre culture » p.24/25

Ce livre est écrit avec humour, malice parfois, mais il se montre dur lorsqu’il parle des conditions de vie des mineurs, par exemple. Aimé Serre n’est pas complaisant, il n’est pas pessimiste, ni optimiste, quant à l’avenir des langues régionales et des patois en particulier…
«  mais il reste fort à faire et les forces d’anéantissement sont toujours vigoureuses »

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L'Ardèche au coeur: le trio des monts ( Gerbier, Sara, Mézenc), les saisons, les traditions, les champignons, ponts de pierre, ruches tronc en châtaignier... Entre modernité et passé pas si lointain...